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- Par Kikoo-lol - Edition du : 25 August 2005 - Créé le : 22 August 2005
Créé le : 15/4/2003
Edition du : 15/4/2003
Auteur : Galan_Dracos

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CHAPITRE 11:  Le destin du guerrier.

 

A l'orée d'Ashenvale, les Sentinelles cessèrent leur course silencieuse, et surent que le moment de laisser les deux émissaires accomplir leur mission était venu. Karelon, qui les avait accompagnées, inconfortablement monté sur une des moins rétives panthères, posa une main rassurante sur l'épaule de son élève. Les mots étaient inutiles: "reviens en vie, mon élève, mon fils" hurlait le corps de Karelon, terrifié par la perspective de perdre l'orphelin qu'il avait élevé, le seul être qu'il ai jamais aimé vraiment. IL jeta un étrange regard au Chasseur de Démons, qui ne s'en aperçut même pas, semblant attendre une réponse, une approbation; elle ne vint pas. Alors, ils tournèrent les talons et s'enfoncèrent dans les taillis.

Dans le lointain, les chasseresses filent vers la forêt, dissimulées dans l'obscurité, tels des insectes blafards regagnant la colonie...deux ombres parmi les ombres restent en place, et attendent, au milieu des frondaisons...Felian et le Choucas se tournent vers les terres de Mulgore, ces plaines si chargées de signification, où l'on sent toutes les différences qui peuvent s'établir entre civilisations alliées. Pour un humains, la plaine est une bénédiction, c'est un terrain propice au pillage et mal défendable pour un orc...et c'est, pour un elfe, une crainte, uniforme depuis les Kal'dorei et même au-delà, la crainte de l'espace où l'on ne peut s'embusquer, sans ombre, si vaste que même la nuit ne peut soustraire le guerrier aux yeux ennemis. Et c'était au-delà de ces plaines désormais partagées entre les humains de l'Alliance et les Taurens des Barrens que se trouvait la destination finale des deux voyageurs, le but de leur traversée, ce pourquoi ils allaient marcher, vivre, et qui sait? mourir ensembles. Silencieux, ils n'osaient se mettre en marche. Felian se dit qu'une plaisanterie aurait pu détendre l'atmosphère avec tout autre que ce Choucas, mais son instinct de survie le poussa à une simple et tacite vérification de son équipement: provisions, armure de cuir noir et, en guise d'armes, deux minces poignarde à lame blanche, bien plus maniable et bien moins voyants que les monstrueuse lames de faux que transportait le Choucas, et qui ajoutaient leur poids à celui des cordes et de la majorité des vivres; en effet, Felian état agile, mais pas véritablement endurant... Muet, son compagnon se mit soudain en marche, si rapidement que le jeune elfe eu du mal à le suivre. Aussi vite qu'il était parti, le Choucas se retourna et fit, de sa voix gutturale:

"Marche de nuit; pas de feu; silence; tu fais ce que je t'ordonne et rien d'autre; n'approche pas les peux-claires du Mulgore". "Compris", fit dans sa tête Felian, enchanté et terrifié d'obéir à un chef tel que celui-ci, et attendant avec une joie enfantine les premières batailles où il ferait montre de ses talents légendaires.

Ces pensées frivoles n'étaient pas du goût du "sérieux" Felian, celui qui avait conscience de l'importance de sa mission: il reprit le dessus et les étouffa. Puis il commença sa longue marche, repensant au Conseil...qui avait attaqué la Citadelle, se demandait-on? Certains parlaient d'une révolte, où les insurgés avaient pris le contrôle des wyvernes et massacrés la garnison; d'autre évoquaient une trahison de l'Alliance, qui avait de nuit fait sauté les fondations de la ville forte. le rumeurs les plus folles couraient: une armée venue du sud pour détruire Ashenvale montait vers la forêt, disaient certain. Point du tout, ce sont les démons qui se vengent de leur défaite. Quelle idée, c'est le commandant de la forteresse qui se rebelle contre Thrall! Certains -parmi les plus sages, les plus respectés - allaient jusqu'à prétendre que le Pic s'était effondré sous les coups de boutoir d'un arbre gigantesque, sorti de terre à l'appel de Cenarius, qui prenait enfin sa revanche! et c'étaient de druides, des sages qui parlaient! Felian faillit ricaner, mais un rapide coup d’œil au muet qui le devançait l'en dissuada. Finalement, il prit le parti de marcher sans réfléchir, et il fut ébahi - c'était la première fois qu'il sortait d'Ashenvale - de la distance qu'il était capable de parcourir: parti au crépuscule, le soleil pointait à l'horizon de Moonglade lorsqu'il ressentit ses premières crampes. La végétation s'éclaircissait, et il s'arrêtèrent pour prendre une bref et silencieux repas. Soudain, une sorte de ricanement se fit entendre; sur le qui-vive, le Choucas saisit sa lame et fouilla du regard l'herbe haute environnante: peine perdue, nulle âme qui vive, et le ricanement était plus méprisant que jamais. Sans que rien ne l'eut signalé, une nuée de petits êtres hybrides de singes, de chat et même d'hommes déferlèrent de la colline vers le deux bivouaqueurs. de façon automatique, Felian saisit ses armes, mais déjà il sentait la morsure des crocs acérés. Quelques coups rapides comme la tempête le débarrassèrent de ces maléficieux lutins, et il en venait toujours d'autres. des coups furieux des lames immenses faisaient valser têtes et membres, et le Choucas semblait à lui seul pouvoir contenir un débordement de sauvagerie primitif.

 Comme les deux guerriers allaient être encerclée, Felian aperçut, sur sa gauche, une étrange flambée verte. Il crut devenir fou lorsqu'il vit le Chasseur de Démon, dont le bandeau masquait mal la lueur qui émanait des yeux, frapper à coups redoublés les assaillants tandis que des flammes d'émeraude jaillissaient de son corps! les membres calcinés, les petits êtres fuirent, non sans abandonner moult cadavres sur la verte colline devenue champ de bataille. Les deux ou trois audacieux qui s'attardaient pour délester leurs alliés furent eux aussi détruits par la fureur démoniaque du Chasseur. Ainsi, les légendes étaient vraies, le Chasseurs de démon faisaient appel aux feux de l'Enfer Sinueux! La peur qu'il éprouvait remplaça l'admiration dans le cœur de Felian, mais ne l'empêcha pas de suivre le Choucas lorsque celui-ci lui intima sèchement de le suivre, non sans cracher: "-Maudits kobolds!

-Je croyais que les kobolds vivaient dans les profondeurs du Pic de Stonetalon...

-Oui.

-Et...?

-Ils n'y sont plus, comme tu peux à présent le constater.

-Mais....

-Ils vivent de rapines; qu'est-ce qui a bien pu les pousser à abandonner leurs grottes pour s'installer à la lumière?".

Comme le jeune elfe n'avait pas de réponses à apporter, ils se remirent en route, mais Felian était bien moins rassuré et s'attendait à chaque seconde à voir surgire des museaux chafouins et des crocs pointus. Finalement, le reste de la journée se déroula sans incident* et, lorsque la nuit étendit sa bienfaisante ombre bleutée et veloutée comme la peau des elfes, les collines s'aplatirent, l'herbe fut soudainement coupée, et Felian se retrouva face à une grande plaine verte qui rosissait sous le soir calme, et si plate que l'on y distinguait la fumée des villages. Mulgore**. 

 

CHAPITRE 12: L'En-Dessous.

 

Les rocs acérés qui encerclaient Ghanâk avaient la couleur du sang frais qui éclaboussait les pavés du sommet; dans cette atmosphère de mort, dans ces vestiges d'une civilisation ancienne, sage et dont la barbarie avait cependant parfois dépassé tout autre, dans les ténèbres de l'antique antre des pré-elfes, le jeune chef avançait avec circonspection, tandis que ses yeux félins s'habituaient progressivement à l'obscurité ambiante. Alors que ses pas le menaient dans une vaste grotte dont la voûte se perdait , qui semblait un véritable château. Soudain, il aperçut une étrange lumière sur sa droite. "-Les créatures", songea-t-il, "Les créatures du Pic veulent ma mort. C'est un piège, un piège!". Mais son âme curieuse n'était pas de nature à abandonner un mystère avant que de l'avoir approché - en outre, cet acte de lâcheté délibéré lui répugnait: vivant déjà avec la honte d'avoir perdu la forteresse qu'il devait protégé envers et contre tout, il n'aurait pu supporter une seconde faiblesse. "-Mes ancêtres du clan Bleeding Hollow seront fiers de moi", pensa-t-il. Oui, il rachèterai sa faute, et mourrai au combat la tête haute, s'il lui fallait mourir. Tandis qu'il s'approchait de la source lumineuse, il constata qu'elle était immobile et dessinait d'étranges formes géométriques. en y collant ses yeux - bien que très diffuse, la lueur violacée, mauve ou bleue selon les reflets qu'elle imprimait sur les roches était faible, comme recouverte d'un mouchoir. il s'agissait de merveilleux cristaux, dont les faces, comme autant de miroirs, reflétaient la lumière de leurs voisines en un merveilleux kaléidoscope. Cette beauté troubla Ghanâk: le danger rôdait alentours, la vigilance était le lien ténu qui le reliait à la vie, il ne fallait pas le rompre. Jetant un coup d’œil par-dessus son épaule, le grand orc sut que, s'il s'était enfoncé plus loin qu'il ne l'avait souhaité dans les profondeurs des Grottes de l'Oracle, aucun ennemi - ni allié - ne l'y avait suivi. Confiant, il s'adossa aux pierres lumineuses et se mit à réfléchir, tout en pansant ses plaies avec ses vêtements en lambeaux.

Une seule destination lui était offerte, pour peu que ses ennemis, venus du Sud par Zeppelins, ne l'aient pas déjà anéantie: Durotar, ville forte et centre de la nation orc de Kalimdor. Là, il pourrait chercher assistance auprès du puissant Thrall, chef de la race orc (dont on excluait alors le clan Blackrock) et, à la tête d'une armée, reconquérir Stonetalon. A moins que, devant son erreur, le grand seigneur de guerre ne lui refuse ce privilège...Ghanâk ne vivrait pas en paria: il se suiciderait afin de racheter par une mort honorable la honte d'avoir failli à sa mission.

Alors qu'il somnolait - l'effort de réflexion, la lumière faible, les blessures, la fatigue avaient fait leur oeuvre, un doux frou-frou lui fit ouvrir les yeux: devant lui se tenait une gigantesque ombre, plus noire encore que le néant dont elle sortait. Sans un bruit, elle déambulait devant lui, sans s'y intéresser le moins du monde. Connaissant les horreurs qu'avaient du traverser les compagnons de Thrall quinze ans auparavant, l'orc jugea sage de s'éclipser sans mot dire. Il n'avait pas fait cent mètres que, de tous les murs à la fois, jaillit un cri effroyable, inhumain, le cri arraché à celui dont l'âme aurait été irrémédiablement pervertie. Et Ghanâk courut, dans les couloirs, traversant des salles où se trouvaient des cristaux plus beaux chaque fois que les précédents, des fontaines enchanteresses et de noirs êtres squelettique qui le poursuivaient. Brusquement, reprenant son sang-froid, il se retourna vers la créature la plus proche, dont l'haleine viciée de pourritures le fit reculer. Empoignant sa hache à deux mains, il se rua sur ses adversaires en poussant un strident cri de guerre! "La folie sanguinaire, la force du berseker", eut-il le temps de penser avant que son arme de douleur et de mort ne réduise le mort-vivant à un état de petit tas presque pitoyable. Tous, vestiges des temps passés où les pré-elfes dominaient le continent, squelettes simiesques dont la damnation avait fait des êtres dépourvus de la beauté de leurs descendants, ombres noires émanant de l'esprit torturé de leur magie primitive, tous tombaient sous la hache impitoyable de l'orc. Parfois presque invisible, même à leurs yeux de feu, il semait parmi eux une nouvelle mort - un apaisement? - et paraissait invincible. "Il ne me font rien", exulta-t-il, "Eux meurent, moi pas!". Soudain, la macabre troupe s'évanouit dans les rocs, comme l'eau est drainée par le sable: à la place occupée précédemment par la horde bancale se dressait à présent l'ombre noire, mais au milieu de l'obscurité palpable qui constituait son corps, brûlaient à présent deux boules de flammes blanches: Ghanâk sut alors qu'il n'aurait pas pu rencontrer d'ennemi plus redoutable que le Revenant de Stonetalon, qui avait failli mettre un terme tragique à la mission de Thrall. Avec un rugissement, le chef orc frappa son adversaire d'un coup qui rendit un son métallique, tandis que le "bras" de son ennemi se levait. esquivant le coup, Ghanâk frappa, esquiva, frappa...le combat aurait pu durer indéfiniment: en effet, si le spectre utilisait toujours la même tactique, offrant son corps à un violent coup de taille, les frappes de l'orc ne lui infligeaient aucune blessure. ce dernier ne vit donc pas arriver la fin de l'affrontement, lorsque le revenant - vaincu? fatigué de ce qu'il ne considérait sans doute pas plus qu'un jeu - disparut dans une gerbe d'éclairs. Assommé, Ghanâk roula au sol.

Des tourbillons se formaient dans sa tête...était-il mort? Sauvé? rétabli dans son honneur? Poursuivi par la honte? Où était-il? Qu'était-il?

"-Tu as donc perdu, fils de la race maudite, qui profane une seconde fois ces lieux sacrés...Moi, Aszune, première prêtresse de la Lune, te garderais ici à jamais, et tu sera livré aux charognard, immortel, dévoré vif jusqu'à la fin des temps pour les crimes de ton peuple!". Alors que se prononçait cet anathème, une autre voix, incompréhensible, se joignit au chorus. Lorsqe "ce" qui s'appelait Aszune reprit la parole, ce fut d'une toute autre voix:"-Mon maître te protège, étranger....tu vivras libre. Il te dit: toi, le chef, part au Sud avec toutes les Peaux-vertes des Barrens, marche jusqu'aux terres de mort. Là, tu trouveras la réponse aux questions que tous se posent...".

 

CHAPITRE 13: Le Chasseur de démons.

 

Le sol de la plaine de Mulgore crissait imperceptiblement sous le pas assuré de Felian, ombre dans la lumière rasante de ce crépuscule, comme s'il avait voulu retourner la terre tout en restant silencieux. La terre de ces régions verdoyantes, calmes, sereines qui semblaient si pacifique et si immortelles, cachait en fait de nombreuses blessures qui, pour récentes qu'elles étaient, n'en brûlaient pas moins les hommes qui la faisaient vivre, la retournaient, l'ensemençaient, elle qui était toujours restée inviolée, telle une vierge guerrière des temps légendaires dont un paysan se serait emparée de force. "Sacrilège", pensait Felian, tout en se répétant dans son for intérieur "La terre de Mulgore est humaine à présent...le dessein des Titans a-t-il été souillé?". Ces blessures étaient dues, dans les villages du nord, à la proximité des forêts elfes, sources de superstitions et de frayeurs suffisantes pour que le Gouverneur y fasse veiller sans cesse des hommes en arme, assistés en cas de besoin par la milice locale. Ces pauvres bougres auraient été balayés comme fétus de paille si les Sentinelles avaient lancés le plus petit raid, mais la mission de l'éclaireur et du Chasseur de démons était d'améliorer des liens diplomatiques, non de les détruire pour toujours: pas une fois durant leur voyage, Felian ne posa ses yeux sur un humain: pour lui, les villages étaient déserts, pour eux la plaine immobile. Seul le Choucas, supputait-il, part parfois en reconnaissance durant la journée, alors que je sommeille. Leur traversée de la contrée de nuit, à marche forcée, n'était pas une épreuve pour son corps endurant, mais il avait parfois besoin de repos.

La seconde cause de l'atmosphère de méfiance des humain, au sud cette fois-ci, était la proximité de la nation de Durotar: depuis soixante ans, orcs et humains se livraient une guerre sans précédent, et la fragile alliance signée quinze ans auparavant n'avait rien fait pour empêcher les peuples de se haïr: c'était une véritable armée - celle de Gilneas - qui stationnait à la frontière et tuait sans sommation tout orc qui s'approchait un peu trop près....L'alliance de la Horde et des clans Taurens coûtait également cher à l'humain qui voyait les terres qu'il aurait dû cultiver "envahies" par des" sauvages" qui "ne valent pas mieux que les orcs". Bref, les plaines de Mulgore étaient un monde où régnaient méfiance et peur, où l'étranger était l'ennemi, où tentaient de coexister trois forces incommensurables, dans un fragile équilibre dont la rupture aurait entraîné un bain de sang sans précédent.

Ce soir-là, auprès d'un cercle de pierre dressées par une antique race, qui semblait défier les deux elfes de s'élever jamais aussi haut, privés de la chaleur d'un feu, étaient assis Felian et son ténébreux compagnon, cherchant à trouver dans une vigilance sans faille le repos que leur chair réclamait avec forces râles. Cependant, l'appel qui s'élevait de l'esprit du jeune elfe était encore plus pressant, et explosa finalement.

"-Impossible.", fit-il en se levant, puis, plus fort: "-C'est impossible!".

En une fraction de seconde, le Chasseur de démon était debout, et le fil de sa lame était à quelques millimètres du cou de Felian.

"-Silence, ou je tue", souffla-t-il, mais,"-C'est impossible. Nous ne mènerons pas cette mission à bien.". L'autre se tut. "-Et c'est à cause de vous.". Silence. "-Parce que vous prétendez nous diriger, mais vous ne me faites pas confiance.". Aucun bruit ne troublait l'air. "-C'est vous qui m'avez choisi...non, je veux dire, je voulais venir, mais vous m'avez accepté et....". Il s'embrouillait, et le Choucas restait immobile, tel un ancien dieu taillé dans l'obsidienne. Finalement, lorsqu'il prit la parole, ce fut d'une voix plus douce et plus menaçante que d'habitude;

"-Te choisir n'est-il pas déjà une preuve de confiance? Ta réaction actuelle me fait regretter cette décision.

-Vous avez bien dû me choisir pour quelque chose", insista Felian,"-Ou me trompe-je en affirmant que vous ne vous embarrassez pas d'inutiles?". On sentait sourdre une froide colère d'incompréhension et de dépit.

"-Tu as raison, petit elfe, je ne t'ai pas choisi pour rien: tu es l'émissaire officiel des elfes à Stonetalon, et je ne suis que celui qui mène la mission.

-Il y a une autre raison!

-Tu étais volontaire.

-C'est tout?" Incrédule, Felian fixa le Choucas dans les yeux, mais comme ces derniers étaient masqués par un bandeau, le résultat fut vaguement pitoyable.

"-Tu n'as pas parlé seul, ce jour-là.". Les paroles du Choucas rappelaient à l'elfe cette sensation au conseil, cette impression qu'une force lui dictait ses décisions comme un texte appris par coeur et qui devait de tout temps être récité.

"-Tu avais une aura.", poursuivit le Chasseur de démons,"l'énergie que tu dégageait me montra la voie à suivre. Nous, Chasseurs, pouvons repérer les auras démoniaques et anéantir leurs porteurs. l'aura que ton esprit irradiait n'était pas maléfique ni bienveillante, mais je l'ai sentie farouchement opposée aux démons, et tu es venu. Tu m'accuses de manquer de confiance; bien que les réponses que je puis te donner n'aient aucune signification pour toi, je t'autorises à me poser une et une seule question. Maintenant, ou jamais plus tu n'oseras.

-Qui êtes-vous?" fit Felian, ayant de tous temps mûri sa question dans les tréfonds de son être. Le Choucas esquissa un rictus.

"-Question amenant une infinité de réponse. La seule chose que tu peux savoir est que je suis Chasseur de démons, mais toi-même tu ne saisis pas la signification de ce rôle. laisse-moi donc te narrer l'origine et la nature de notre confrérie.

Tu dois d'abord savoir que, contrairement à ce que prétendent ces prétendus savants" - il cracha - "la Légion Ardente n'est pas la seule entité démoniaque de l'univers. Oui, nombreux furent les Titans, mais plus nombreuses encore les planètes et étoiles qu'ils devaient agencer. Sur les centaine de milliers d'êtres créateurs qui firent tout jaillir du néant sans fin, nombreux furent ceux qui se détournèrent de la création pour aller vers la domination, tels que les seigneur sombre, Sargeras" - Felian frémit - "l'un des plus puissants. Ils appelèrent d'autres forces, formant es armées telles que la légion Ardente, que nous appelons les Sombres Cohortes, et rivalisent de tout temps pour la domination de l'univers. Là-dessus, tu dois ignorer presque tout, car tu n'es pas un initié, mais je peux te dire ceci: nos pouvoirs de feu infernal, notre force surnaturelle sont les fruits d'un pacte passé avec une autre entité de nom inconnue, qui lutte contre la légion et a fait de nous ses agents sur Azeroth - tout en nous permettant de défendre cette terre que, malgré notre damnation, nous chérissons. Nous savons reconnaître le mal, et j'ai senti venant de Stonetalon les relents d'un mal ancien, qui doit être expurgé. longtemps nous avons dormi dans le sommeil d'émeraude, et à présent nous défendons encore Kalimdor. Un seul d'entre nous a failli à sa tache - son nom était Illidan.". Felian retint son souffle à la mention du déchu. "Il fut perverti par son propre pouvoir et devint l'égal d'un démon majeur parmi ceux qui nous emplissent de leurs pouvoirs. Mais sa folie et sa rage étaient si grandes qu'il était prêt à tout afin de massacrer ses ennemis d'antan - pour pouvoir, ensuite, se tourner contre les elfes qui, redoutant se réactions dans le sommeil d'émeraude, l'ont enfermés au sein de la Cave des Griffes pour toujours. Nous, ses frères, avons dû lui brûler sa volonté à l'aide d'éclairs mortels, afin de préserver notre race, et il a été banni en même temps que la Légion vers l'Enfer Sinueux où il sera Felian restait silencieux, assimilant les informations incroyables et nouvelles qui lui étaient données, sans mettre en doute leur véracité - un Chasseur de démons mentirait-il? - et revoyant ses opinions sur l'univers en général, et sur le Choucas en particulier, cessant de le craindre et admirant son sens du sacrifice et son invraisemblable dévotion à sa terre. brusquement, l'objet de ses pensées ses leva.

"-Viens", fit-il, et ils gravirent une colline derrière laquelle Felian vit...Grands dieux! Qu'était cette immense masse de rocs et de fer, qui arrachait le ciel d'un violent coup de corne et écrasait les Barrens? Munie de pointes et de flèches, parée de rouge et d'or au sein de la nuit tombante, tandis que les derniers rayons du soleil mouraient, Stonetalon s'offrit à la vue de Felian pour la première fois.

 

CHAPITRE 14: Les Murs de la Citadelle.

 

Tandis que le jeune elfe emplissait ses prunelles de cette vision de l'avenir, il ne put s'empêcher de s'interroger sur la signification des couleurs feu et sang qui faisaient chatoyer les parois du Pic, présages de mort et de destruction. Sans se demander quel sortilège permettait au Choucas de percevoir lui aussi la présence dont la Forteresse emplissait l'air, Felian mit un certain temps à s'apercevoir que l'illusion n'était que trop réelle: de nombreux baraquements étaient en flamme, et les ombres menaçantes qu'aurait du faire planer le vent poussiéreux restaient invisibles. Ennemis ou alliés, les êtres qui les attendaient ne seraient en tout cas pas avertis de leur présence par l’œil des wyvernes. Redoutées par les elfes plus encore que par les humains, les mi-dragons avaient depuis longtemps montré leur supériorité sur les hippogryphes, et les seules créatures susceptibles de leur barrer la route - celles que les humains appelaient "Griffons", et qui figuraient dans les récits des sages en tant qu'Esdle-Duîn - avaient été impitoyablement massacrées lors de la prise du premier Fort de Stonetalon, celui des Humains. néanmoins, aucune peur ne prit place dans le cœur de Felian, même s'il ne resta pas indifférent à ce spectacle...Le Chasseur de Démon s'en retourna près du bivouac, et Stonetalon fut balayée de l'esprit de Felian qui se remémora d'un coup leur discussion précédente, qui avait eu lieu depuis un dixième d'heure à peine, et qui semblait déjà si lointaine: alors seulement, Felian découvrit le pouvoir du Pic de Stonetalon, et porta ses jambes chargées de quatre cents lieues et plus encore, lasses et gourdes au douzième jour de son voyage, vers son compagnon.

Au loin brûlait Stonetalon, au loin brûlaient Azeroth et Lordaeron, Northrend et New Stormwind, terres où mourait, naissait et encore rugissait le Soleil. Et Felian ne le savait pas.

"-Y serons-nous à la prochaine obscurité?" interrogea-t-il. Avec un bref hochement de tête, le Choucas économisa encore un mot. D'humeur euphorique, l'elfe se demanda ce qu'il pouvait bien en faire.

"-Encore deux nuits.

-Quoi? Le Pic a l'air tout proche!

-Illusion. C'est la taille de la Citadelle qui te fait penser cela. Le Mont Hyjal est une colline, en comparaison du Roc*. En vérité, nous n'y seront qu'à la lune croissante, mais leurs guetteurs nous auront repérés bien avant.". Il sortit des replis de sa tunique noire une étrange fiole biscornue qui semblait contenir un liquide jaunâtre. Une de ces potions d'invisibilité humaines dont lui avait parlé Karelon?

"-Enduis ta face et tes vêtements de la substance", fit le Chasseur de démons d'un ton énigmatique. Sans méfiance, n'y voyant pas malice, Felian obtempéra. Collant comme le miel, le produit avait l'odeur des pierres chauffées au soleil des plaines de Mulgore, et la pointe qui se déposa sur les lèvres de l'éclaireur était sucrée - très sucrée; un geste du Choucas empêcha Felian de se passer la langue sur les lèvres, et un simple mot résonna à ses oreilles:"-Soporifique". Comprenant la leçon, l'elfe sentit une intense chaleur se répandre sur tout son corps, tandis qu'avec une aspiration à peine audible les pores largement espacés de sa peau absorbaient l'épaisse couche de mélasse à une vitesse impressionnante.

"-Qu'est-ce donc que cette..." le mot exact ne lui vint pas, et sa langue s'embarrassait dans sa bouche. sans doute un effet de la pinte de...qu'il avait avalée.

"-Sangsoleil; tu vois seulement jaunir nos peaux" - effectivement, Felian compris la raison d'être de ce nom de "Sangsoleil" - "mais les orcs et les pâles humains ne distingueront qu'un pâle reflet, qu'une ombre mouvante tachée de lumière. Ainsi, nous iront jusqu'à Stonetalon. Cependant," - sa voix se fit plus basse, plus menaçante - "tu devras me suivre à tout prix si les wyvernes sont lâchées, car leur oeil est celui du dragon, et nul ne peut s'y soustraire, même ces mages humains qui parviennent à l'invisibilité totale. Il y a assez de produit pour plusieurs jours, alors repose-toi car bientôt, nous seront sous les murs de Stonetalon". Un rictus plissa ses lèvres. "Et la poix brûlante est moins agréable que la caresse du Sangsoleil".

Ce fut effectivement au bout de plus de deux jours et deux nuits que les elfes parvinrent au pied du Pic, après un parcours digne des marécages les plus bourbeux; rampant, se traînant sur le sol pour rester totalement invisibles - Felian avait tôt fait de comprendre que ce foutu Sangsoleil lui donnerait l'air d'une lumière qui marche, effet sans doute impressionnant mais pas discret pour un sou - et parfois se relevant pour filer à l'abri d'un rocher, le tout sous le soleil écrasant du désert et l’œil complice des vautours, taches noirâtres dans le ciel bleu. la frontière entre mulgore et les Barrens était délimitée par une bande étroite, si étroite! de terre verdoyante se changeant subitement au bout de quelques centaines de mètres en sol craquelé, jaunâtre ponctué çà et là de tas de poussière formant des dunes de plusieurs pieds de hauteur.

Face à la paroi la plus raide de la montagne, à l'ombre des nuages qui obscurcissaient la lune, Felian adressa une brève prière à Selune afin qu'elle l'assiste dans l'épreuve qui allait suivre. La décision du Choucas avait vite été prise: tant que les occupants actuels de la Citadelle n'étaient pas connus, il fallait rester dans l'obscurité et agir en espions plus qu'en ambassadeurs. Néanmoins, le jeune guerrier faillit hoqueter de surprise lorsque son compagnon lui annonça sans ambages qu'ils allaient tout bonnement escalader la Pic! Après réflexion, bien sûr, Felian admit que toute autre voie serait bloquée par les redoutables tours orcs qui les réduiraient vite en charpie.

"-Où sont les crampons?

-Pas de crampons.

-Mais comment...

-Tes jambes. Tes mains. Tes coudes.". Conversation brève dans le noir, sans que Felian ne put protester: à la merci de la moindre alerte, la discipline seule devait les sauver.

L'ascension débuta...derrière le Choucas qui escaladait chaque aspérité avec une dextérité déconcertante, Felian peina rapidement. Cherchant sans cesse la moindre éminence pour s'y appuyer - de tout son poids bien sûr, afin de garnir ses mains d'écorchures et de cloques. Chaque ricochet des cailloux qu'il délogeait avant chaque action afin d'éviter un coulissement des plus désagréables préfigurait un sombre avenir, et ce satané bruit lui faisait penser aux os qui se brisent. D'ailleurs, la tête obscurcie par ce ramassis de foutaises, il manqua par deux fois de se rompre le cou en glissant sur une saillie, pensant d'abord: "Ouf, je l'ai échappé belle!", puis "Cette saleté de montagne n'a donc pas de foutu sommet ?". Ce fut donc à l'état de vigilance mais bien nerveux qu'il arriva au sommet où l'attendaient le Chasseur de démons ainsi qu'un orc assommé et ligoté. Oui, il avait mis du temps à monter, Felian.

"-Ce n'est pas un Orc de la Horde de Thrall. Notre mission vient de changer, Felian: nous devons découvrir qui sont ces êtres et ce qu'ils font dans la Citadelle.

Arpentant les couloirs vides de toutes présence, ils croisèrent ici et là quelques traces de la bataille qu'avait vu se dérouler les murs sombres et silencieux: flaques de sang, cadavres impitoyablement morcelés, chairs calcinées, et quelques armes en trop mauvais état pour êtres ramassées. Toutes les pièces d'équipement repérées dans des armureries à l'abandon semblaient de facture orc, mais alors que certaines étaient efficaces, et bien affûtées les armes qui les accompagnaient, d'autres étaient de fabrication rustique, faites de fer mal poli, de cuir lacéré, de bois noueux et cassant. ce ne fut que lorsqu'ils sortirent du petit fortin où les avait menée leur escalade qu'ils s'aperçurent de l'étendue des désastres: le Bastion était réduit en cendres, comme la moitié de la ville. Les cadavres qui gisaient dans les rues - femelles et tout-petits - ainsi que le pillage forcené qu'avaient subies les villes Hautes et Basses, ainsi que la présence de quatre zeppelins près des tours où les wyvernes se délectaient du précédent carnage ne laissaient aucun doute sur l'issue de la bataille.  Quant au Bastion principal, il ne subsistait plus qu'à l'état de cendres qu'auraient pilonné pendant des heures un poing de bronze gigantesque.

"-LOOOOOOK TAAAAAAR OGAAAAAR !!!!". Le hurlement provenait d'un des pans de mur du Bastion encore vaguement debout. Prompt comme la foudre, le Choucas se précipita vers l'orc vociférant qui appelait à l'aide ses alliés. Une, deux, trois flèches brisèrent l'air saturé de poussière, peine perdue, en quelques bond les Choucas s'était approché de l'une des parois et lorsque fusa le quatrième trait, sa lame était déjà imbibée de sang encore chaud, tandis que sa mais griffue arrachait à l'être monstrueux un étrange médaillon argenté. Mais déjà, d'autres ennemis rappliquaient. Nous voilà pas dans une belle merde. Felian saisit ses coutelas, et affronta les orcs armés de solides haches et protégés par des armures épaisses au côté du Chasseur de Démon, qui s'était agrippé à une corde trouvée on ne sait où et fixée au sommet d'une tour en ruines. Le souvenir de cette bataille devait toujours rester flou, pour ne revenir que sous forme de trois lames déchiquetant chairs rouges et peaux pareillement décorées de rouge, de haches fendant l'air et lui infligeant entre autres une vilaine estafilade à la cuisse, qui le lancinait encore, de deux elfes sautant du haut de la falaise vers une saillie bien précise après une poursuite effrénée, d'un choc sourd et d'un abîme de noirceur...puis d'un réveil en bas du Pic de Stonetalon, d ‘un rétablissement difficile.

"-Que ferons-nous?

-Malgré tout ce carnage…il pourrait y avoir des survivants. S'il y en a, ils sont au Sud, à Durotar. Il nous faut avertir Thrall et savoir ce qui c'est réellement passé.

-Partons, alors!".

Et ils partirent.

 

CHAPITRE 15: Au-Delà du désert.

 

Après son réveil - Ghanâk aurait juré qu’il avait passé son temps à se faire assommer puis réveiller, dans les cavernes de l’En-Dessous – le chef orc décida de suivre la voie que lui avait imposée le mystérieux « maître » d’Aszune : quelle était la « réponse » que devaient lui apporter les Terres Mortes, au sud des Marais Murlocs, il n’en avait cure, ignorant encore les « questions » concernées. En revanche, il n’avait pas renoncé à aller à Durotar, et quand bien même les Terres Mortes lui donneraient l’occasion de chasser les inconnus qui avaient pris sa Citadelle et de recouvrir son honneur perdu, l’expression de son devoir lui commandait d’aller parler à Thrall Durotanson, Chef de Guerre de la Horde des Orcs. A travers les couloirs des sombres souterrains qui s’étendaient sous le Pic, il marcha, sans cette fois rencontrer âme qui vive…ou ne vive plus, demeurant encore plus dangereuse. Quelques squelettes épars lui rappelaient désagréablement le sort qui avait failli être le sien, et c’est avec soulagement qu’il aperçut le rayon jaunâtre et le sol recouvert de sable brûlant qui lui annonçaient la sortie qu’il avait tant espéré. Il se rua dehors, et un coup d’œil lui suffit pour savoir qu’il avait parcouru, comme il l’espérait, une grande distance en direction du sud.

Sa marche commença alors. Torturé par la faim et la soif, il avançait chaque pied avec plus de difficulté, et un rapide compte lui permit de s’apercevoir qu’il avait aboli repos et nutrition depuis près de trois jours – sans compter le temps qu’il avait pu passer à gésir au fond de la grotte où il avait rencontré le Revenant. Pourquoi alors continuer ? se demandait-il souvent, et la même réponse, implacable, se soumettait sans cesse à son esprit : parce que  je le dois. Trop fier pour croire qu’il s’agissait d’un désir égoïste, il énumérait, comme pour éviter de sombrer dans la folie, les noms de ceux pour qui il se mourait : Thrall, Geodûk et Skinee et tous les orcs de Stonetalon, et pour Aldarot aussi, et Darenoz, pour sa hache qui, assoiffée de sang, gémissait après la gorge des traîtres. C’était sa dernière chance de survie, et il comprit alors que la haine était un moteur plus puissant que le devoir.

Le soleil était pratiquement à son zénith, et un vent brûlant se levait du sud, fouettant le visage de Ghanâk de grains de sable tranchants lorsque l’orc entra dans une sorte d’oasis dépourvue d’eau – un assemblage hétéroclite de plantes résistantes à la chaleur torride. Il entendit alors, très faiblement, mais de plus en plus clairement, des sons qui, bien que masqués par le rugissement du vent, s’identifiaient clairement comme des voix. Il s’approcha lentement, comme en embuscade, vers le bosquet qui semblait abriter les propriétaires des étranges voix. C’était un arbuste pourvu de feuille tranchantes et poreuses, aspirant l’eau qui venait parfois du large se perdre dans le désert sous forme de vapeur. Tout tranchait, tout griffait dans les Barrens, et leur chaîne alimentaire était en forme de spirale.

L’œil perçant de Ghanâk aperçut alors, derrière les branchages hérissés de ronces, deux êtres en train, semblait-il, d’établir un bivouac rudimentaire. En s’approchant plus, le chef orc sut qu’il s’agissait d’elfes de la Nuit, à la peau violette. L’un, petit et mince, était muni de deux lames et son apparente agilité ne laissait aucun doute sur ses capacités à s’en servir. L’autre était bien plus inquiétant, et ce ne fut pas la chaleur qui fit couler une goutte de sueur sur le visage de Ghanâk lorsqu’il vit le bandeau noir, qui masquait les yeux aveugles de l’elfe gigantesque, dont la musculature rivalisait avec celle de l’orc, et qui portait une gigantesque arme formée de deux lames en forme de lune, hérissée de crochets acérés. Le visage de Ghanâk se crispa. Les elfes pouvaient bien être ceux qui avaient attaqué le Pic, et Darenoz était assez perverti pour leur avoir proposé une alliance. Il se préparé alors, malgré son état de faiblesse extrême, à bondir sur ceux qui ne l’avaient pas encore repéré. Il se ramassa sur lui-même, tel un fauve, et s’apprêtait à sauter puis à égorger l’elfe le plus jeune lorsqu’une violente rafale d’énergie le frappa en plein épigastre. Le souffle coupé, il ne put que regarder l’elfe gigantesque s’approcher en brandissant son angoissante arme destinée à mordre et à déchirer les chairs. Quelle ne fut pas sa surprise lorsque ce dernier se pencha vers lui, le relevant comme on aurait fait d’un enfant ! Aussitôt, il récupéra son arme qui avait roulé au sol lors de sa chute, se dressa devant les deux compagnons – s’apercevant par là-même que le plus jeune s’était à son tour armé – et…hésita un instant. Ne venaient-ils pas de manifester leur absence de mauvaises intentions. Dans la chaleur du désert, le Choucas et Ghanâk se regardaient, face à face. Duel de titans.

Felian jugea bon d’intervenir avant l’explosion de la situation. Il se plaça entre les deux combattants, et sur un ton en apparence désinvolte, engagea un dialogue – rassuré au demeurant par la présence du Choucas, bien qu’il n’osât imaginer les dégâts que causerait une bataille entre les deux monstres qui le dominaient.

« -Qu’est-ce que tu fais ici, l’orc ? » demanda-t-il.  « Viens-tu du Pic de Stonetalon ? ». Un grognement lui répondit. Décidément, cet orc ne se montrait pas plus loquace que le noir compagnon de Felian.

« -Nous recherchons des survivants de la bataille », reprit-il, sans préciser à quel camp devait appartenir ces survivants. « -Nous sommes les émissaires du Conseil des elfes d’Ashenvale. Qui êtes-vous ? ». Aucune réponse, et le jeune elfe était de plus en plus mal à l’aise. Finalement, il décida de se fier à son intuition : cet orc n’était pas vêtu aussi frustement que ceux qu’il avait du combattre.

« -Nous devons retrouver ceux qui se sont échappé – les assiégés », finit-il par dire. « Qui êtes, vous, encore une fois ? Nous sommes vos alliés, messire…. ?

-Mon nom est Ghanâk ». Rassurant : le poisson ferré saurait parler pour sa défense – afin d’éviter la friture.

« -Je suis…non, j’étais le commandant de la Citadelle de Stonetalon. ». Je n’aurais pas pu mieux tomber. Felian se retenait pour ne pas sauter de joie : qui mieux que le chef de la forteresse aurait pu informer les elfes sur le déroulement de la bataille ?

« -Vous vous êtes échappé, n’est-ce pas ? Par quel moyen ? Qui étaient vos assaillants ? Etaient-ce des orcs de Thrall ou…

-Des orcs ! Darenoz, maudit ! » et il s ‘écroula, marmonnant des propos sans suite, implorant parois à boire. Felian s’interrogeai sur la signification de ces paroles : les soldats de la Citadelle n’avaient-ils pas seulement vus leurs ennemis ?

Après avoir bu un peu, l’orc qui s’appelait Ghanâk se montra à nouveau en état de parler.

« -Racontez-nous ce qui c’est passé », fit Felian avec un ton qui se voulait compréhensif.

« -Ils sont venus…à la nuit tombée dans…dans des zeppelins…quatre ou cinq zeppelins. Les gobelins nous ont trahis et…(gémissement)…dans les zeppelins…des ennemis, beaucoup d’ennemis. Ils ont pris les wyvernes et…

-Comment ? Les wyvernes ?

-Sorcellerie ! » éructa le chef orc.  « -Ils ont employé la magie interdite !  Lorsque nous nous sommes réfugiés dans le Bastion – à l’abri des lances empoisonnées des chevaucheurs de wyvernes – ils ont jeté un sortilège et…la moitié de la Forteresse a été réduite en cendres.

-Comment vous-êtes vous enfuis, alors ? ».

Le ton de l’elfe exaspérait Ghanâk, ravivant en lui des blessures qu’il voulait éteindre pour jamais. Sa fuite, sa lâcheté…il s’interdisait d’y penser.

« -Que signifient ces questions ? », fit-il sur un ton qui se voulait désagréable – c’est-à-dire, encore plus que d’habitude. « -Vous dites parler au nom d’Ashenvale, mais qu’est-ce qui me prouve que vous n’êtes pas de mèche avec les…orcs qui nous ont  attaqué, hmm ?

-Ceci », articula Felian en exhibant ses poignards, dont le pommeau était orné de tout ce qu’un habitant des Barrens identifiait comme le sceau des elfes de la Nuit : la tête de panda noire et blanche, aux yeux d’améthyste violacée.

« -D’accord ,» fit Ghanâk comme à contrecœur, « -Vous êtes des émissaires de la forêt et…vous venez observer ce qui se passe au Pic, n’est-ce pas ? ». Dans la bouche de l’orc, ce mot sonnait comme espionner.

Signe affirmatif de Felian. « -Nous avons vu que le Pic était tombé, et nous avons décidé de rechercher des survivants, qui pourraient nous en apprendre plus.

-Mais je n’en sais pas plus que vous.

-Exact.-C’est pourquoi vous devez m’accompagner à Durotar, et rencontrer, en tant qu’ambassadeurs, le Chef de Guerre de la Horde, Thrall Durotanson. ».

Ce coup-ci, même le Choucas ne s’y attendait pas. Le premier instant de surprise passé, Felian reprit, sous l’œil vigilant de son ténébreux compagnon :

« -Vous…vous n’y songez pas ! Les elfes ne sont pas les bienvenus dans les terres orcs, et ce depuis l’arrivée des orcs à Ashenvale ! Nous nous ferions massacrer !

-Il faut que vous m’accompagniiez ! La chute du Pic est une menace pour tous les êtres vivants de la moitié nord de Kalimdor, et vous êtes les seuls qui puissent représenter l’armée des Sentinelles, si les occupants du Pic attaquent Ashenvale ! ». Le guerrier elfe ne put que se rendre à la justesse du raisonnement : Stonetalon était une porte ouverte sur les forêts elfes, et nul ne pourrait repousser les wyvernes. Le signe de tête affirmatif du Choucas le confirma dans ses pensées : il se retourna vers l’orc, dressé comme un véritable combattant, et hocha lentement la tête.

« -Mon nom est Felian, disciple de Karelon le Sage , et mon compagnon est un Chasseur de démons qui m’escorte. On l’appelle le Choucas. ». Ghanâk fit un petit signe de tête, sans accorder trop d’importance à ces paroles, songeant déjà au voyage qui les attendait, jusqu’à la cité orc de Durotar, loin, au sud…au-delà du désert, au-delà de la mort.

 

FIN de la première partie.

 

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